Pépinière Decugis à Hyères-les-Palmiers : Une passion familiale bien située
S’il est bien, dans le sud de la France, deux noms qui évoquent les palmiers, c’est celui de la famille Decugis, dont les pépinières sont spécialisées dans le semis et la culture de ces arbres, et celui de la ville où elles sont installées : Hyères-les-Palmiers (Var). Rencontre passionnée.
Une pépinière familiale de passionnés
La pépinière Decugis cultive les palmiers depuis 1904 dans la capitale française de cet arbre, Hyères-les-Palmiers bien évidemment! L’arrière-grand-père, Louis Humbert, a commencé cette culture par la production de Phoenix canariensis, qui étaient semés sur place, et Howea fosteriana, qui étaient reçus en jeunes plants en provenance de Belgique. Ils étaient cultivés sous des ombrières faites de bruyère arborescente (plante indigène). La pépinière est perpétuée avec Alfred Decugis, puis Roger Decugis et, aujourd’hui, Violette Decugis.
Cultiver des espèces plus adaptées
Jusque dans les années 1980, des milliers de Phoenix canariensis sont ainsi semés, puis cultivés en pots de terre enterrés, pour atteindre jusqu’à 170 cm (hauteur avec les feuilles relevées et attachées) à leur commercialisation. Après les catastrophes climatiques de 1985 et de 1986 (-9 °C et -12 °C pendant dix jours), la pépinière constate la résistance de certains palmiers au froid sur Hyères et plus généralement sur la Côte d’Azur.
Elle se met alors à semer et à produire les espèces qui ont prouvé non seulement leur résistance au froid, mais aussi leur faculté à se régénérer pourvu qu’on leur en « laisse le temps ». Notre palmiériste, Violette Decugis, arrière-petite-fille, mène une carrière avec « palmes » ! Elle sème des graines et cultive une trentaine d’espèces et variétés qui peuvent traverser des hivers exceptionnels. Elle dit avoir une préférence pour les épineux qui savent « se faire respecter » et pour notre palmier européen, le Crétois : Phoenix theophrasti Greuter, protégé par la Communauté européenne.
Elle nous relate son expérience et nous présente quelques genres et espèces, petits ou grands, de mi-ombre voire d’intérieur, acclimatés, résistants aux températures négatives. Ci-après, les précisions de rusticité données le sont à titre indicatif pour des plantes adultes où le feuillage est touché, mais rappelons-le, elles dépendent aussi de la durée du froid et de l’humidité du sol.
Les Brahea
• Brahea aculeata Feuilles palmées vert foncé à vert clair. Stipe unique. Ils ont tous été défoliés par les gels de 1985-1986. Ils sont tous repartis l’été suivant. Rusticité -9 °C -10 °C.
• Brahea armata (palmier bleu du Mexique) Feuilles palmées grises à bleues. Stipe unique et fin. Les inflorescences ont toutes gelé. Un des plus beaux palmiers de par ses inflorescences odorantes de couleur ivoire. N’a pas été touché par le froid et n’a plus fleuri pendant deux à trois ans. Rusticité -14 °C -15 °C.
• Brahea brandegeei (palmier de San José) Feuilles palmées en éventail vertes. Grand stipe fin et élancé. Rusticité -5 °C -7 °C.
• Brahea Edulis (palmier du Mexique) Palmier de croissance rapide. Grandes feuilles vertes. Il a résisté au froid de 1985-1986 et il possède une bonne capacité à renouveler son feuillage en cas de destruction. Rusticité -7 °C -9 °C.
• Butia capitata (B. capitata var. odorata) (palmier abricot) Palmes pennées vertes à glauques, bleues. Stipe massif. Fruits comestibles. N’a pas été touché par le froid et n’a plus fleuri pendant deux à trois ans. Rusticité -14 °C -15 °C.
• Chamaedorea microspadix (palmier bambou) de mi-ombre ou d’intérieur. Palmes pennées. Palmier multicaule au stipe fin. A gelé en 1985 et 1986. Bonne reprise du pied après le froid. Rusticité -8 °C -10 °C.
• Chamaedorea radicalis (palmier bambou) de mi-ombre ou d’intérieur. Stipe unique et fin. N’a pas gelé sous canopée. Rusticité -10 °C -12 °C.
Les Chamerops
• Chamerops humilis (palmier nain de Méditerranée) Feuilles palmées vertes. Stipes multiples de hauteur variable. N’ont pas été marqués par le froid. Rusticité -14 °C -15 °C.
• Chamerops humilis var. argentea (C. humilis var cerifera) Feuilles palmées vertes ou bleues. Stipes multiples. N’ont pas été marqués par le froid C’est aussi le palmier le plus attaqué par les ravageurs. Un traitement régulier est obligatoire chaque année. Rusticité -14 °C -15 °C.
• Chamerops humilis ‘Vulcano’ Port compact, dense et serré. Feuilles palmées vert foncé. Inerme. Stipes multiples. Idéal pour balcons et terrasses. Rusticité -14 °C -15 °C.
• Jubaea chilensis (cocotier du Chili) Feuilles pennées vertes. Inerme. Grand stipe lisse. Un des plus lents pour germer et croître. Fruits comestibles excellents (goût noix de coco). N’a pas été touché par le froid et n’a plus fleuri pendant deux à trois ans. Rusticité -14 °C -15 °C.
• Livistona australis Feuilles palmées vertes. Épineux. Stipe élancé et fin. Entièrement défolié par le froid. Il est reparti parfois deux ans après le gel. Rusticité -6 °C -7 °C.
• Livistona chinensis (palmier de Livingston) Feuilles palmées vert soutenu. Stipe élancé et fin. Très décoratif, peut vivre au soleil, à mi-ombre ou à l’intérieur. Le froid a fait disparaître le feuillage. Les jeunes plants (trois feuilles séminales) sont tous repartis. Rusticité -6 °C – 7 °C.
• Livistona decipiens (latanier pleureur) Feuilles palmées vertes entièrement retombantes. Épineux. Feuillage touché par le gel mais moins que les autres. Rusticité -8 °C – 9 °C.
Les Phoenix
• Phoenix canariensis (dattier des Canaries) Le roi des jardins. Feuilles pennées vertes, luxuriant. Épineux. Fruits jaunes. A quasiment disparu des cultures et des parcs et jardins. C’est « le terrain idéal » pour les charançons. Attaqué par les ravageurs, un traitement régulier est obligatoire chaque année. Ce palmier a été complètement défolié en 1985. Il s’est régénéré lentement. Rusticité -9 °C -10 °C.
• Phoenix dactylifera (palmier dattier issu des dattes de Medjool, Deglet noour, Mazafati). Palmes grises érigées, moins nombreuses que Phoenix Canariensis. Épineux. Stipes plus fins. Les fruits n’arrivent pas à maturité. Les Phoenix dactylifera ont tous été défoliés par le gel mais sont tous repartis. Il peut être multiplié en séparant ses rejets. Attaqué par les ravageurs. Un traitement régulier est obligatoire chaque année. Rusticité -7 °C -9 °C. Supporte les gros écarts de température.
• Phoenix porphyrocarpa (dattier des Canaries proche de P. canariensis) Palmes pennées, glauques. Épineux. Ce Phoenix a fleuri et fructifié l’année d’après les gels alors que les P. canariensis hésitaient encore entre mourir ou repousser. Les fruits rouges ont été récoltés avec l’aide de la ville d’Hyères et semés. Fruits plus petits que P. canariensis et sucrés. Croissance plus rapide que P. canariensis et bien sûr une meilleure résistance et capacité à se régénérer après le froid. Rusticité -10 °C -12 °C.
• Phoenix theophrasti (palmier de Théophraste) Les premières graines sont venues de Crête. Depuis 2020 quelques individus fructifient sur la Côte et ne sont pas hybridés puisque les Phoenix canariensis ont quasiment disparu. Palmes grises extrêmement armées. Épineux. Rejets nombreux. Très bonne reprise après le gel. Rusticité -10 °C -12 °C.
• Rhapidophyllum hystrix (palmier aiguilles) Le plus rustique d’entre tous. Feuilles palmées profondément découpées, vert sombre. Touffe large. Rusticité -25 °C.
• Sabal minor (sabal nain) Palme plate vert un peu grisé. Inerme. Stipe très court formant une touffe buissonnante. -15 °C, voire au-delà à -20 °C.
• Sabal palmetto (chou-palmiste) Feuilles petites extrêmement costapalmées vert clair. Inerme. C’est le plus haut des Sabals. Arrosage régulier, toute l’année même en cas de gel. En 1985- 1986, les Sabals n’ont pas été touchés par le froid. -15 °C, voire au-delà à -20 °C.
• Sabal umbraculifera (chou-palmiste) Palme costapalmée glauque. Inerme. Stipe unique. -15 °C, voire au-delà à -20 °C.
Les Trachycarpus
• Trachycarpus fortunei (palmier chanvre) Bien connu de tous, il se caractérise par son tronc en colonne solitaire recouvert d’un épais lacis de fibres brunes. Au sommet du stipe, chaque année se développent de nouvelles feuilles vert foncé. Épineux. Fleurs jaunes. Rusticité -17 °C voire au-delà.
• Trachycarpus wagnerianus Feuilles palmées vert foncé. Épineux. N’a pas été concerné par les températures négatives. C’est l’un des palmiers les plus touchés par le papillon du palmier. Rusticité -15 °C -17 °C.
• Trithrinax campestris (palmier trident) Feuilles palmées raides, petites, armées, gris-bleu. Épineux. Palmier multicaule de croissance lente. Bonne germination si les graines sont fraîches. Graines comestibles. N’a pas été touché par le gel. Rusticité -15 °C -17 °C.
Les Washingtonia
• Washingtonia filifera (palmier à jupon) Feuilles palmées vert clair, pétiole portant de petites épines pâles. Stipe unique. Sol drainé en hiver. N’a pas été touché par le froid. Rusticité -10 °C -12 °C.
• Washingtonia robusta (palmier jupon du Mexique) Feuilles palmées, pétiole épineux, épines colorées. Haut stipe fin marron rougeâtre devenant gris. De croissance rapide, le plus haut des palmiers sur la Côte d’Azur. Ils ont tous été défoliés par le gel. Résiste aux sols salés. Rusticité -8 °C -9 °C. La vente des palmiers n’est plus ce qu’elle était, mais la passion est toujours présente. La Pépinière Decugis sème toujours les « Princes des jardins », comme les appelait Linné.
Violette Decugis
Pépinière Decugis à Hyères-les-Palmiers (Var)