Patrimoine végétal : Le CCVS préserve et valorise les collections horticoles
Suite au constat que de nombreuses espèces et variétés de plantes disparaissaient de façon irréversible, des scientifiques et amateurs éclairés ont créé en 1989 le Conservatoire des collections végétales spécialisées (CCVS). Son but est de préserver les plantes ressources menacées de disparition et qui constituent le réservoir génétique de la biodiversité sur terre. Il défend aussi l’importance des collections.
À l’heure des divers bouleversements géopolitiques, climatiques, sociaux, culturels, économiques et environnementaux apparus ces dernières années, il est temps pour les collectionneurs de plantes de faire un point d’étape : qu’est-ce qui fait sens, dans quelle direction aller ?
Que représentent les collections de plantes, aussi bien dans leur milieu d’origine (in situ) qu’en dehors (ex situ) : grand public, aménageurs, responsables de collectivités territoriales, ou organisations œuvrant pour la sauvegarde de la biodiversité et l’élargissement de la palette végétale ?
Quels outils sont-elles pour le développement culturel et économique au bénéfice du bien-être des habitants de nos terroirs et territoires ? C’est bien le débat posé par les troisièmes Universités du Conservatoire des collections végétales spécialisées (CCVS)(1*) qui ont eu lieu à Paris les 14 et 15 septembre 2023 avec le soutien notamment de la Ville de Paris, du directeur de son jardin botanique, Régis Crisnaire, de l’interprofession horticole, ValHor, de toutes les équipes partenaires, et avec la contribution d’experts européens.
Vers la reconnaissance du Patrimoine végétal vivant
À cette occasion, la reconnaissance officielle du Patrimoine végétal vivant (PVV) a été affirmée et demandée auprès de tous les responsables politiques nationaux et européens. La notion de patrimoine est complexe et globale. Si le patrimoine bâti et le patrimoine immatériel sont reconnus depuis longtemps, il n’en est pas de même pour le Patrimoine végétal vivant. Toutes les formes de patrimoine s’organisent ensemble. Or le végétal est le maillon essentiel de la chaîne du vivant : il est indispensable à l’humanité et à ses activités. Nous avons besoin des plantes pour vivre, et non l’inverse. Les plantes ne sont pas une matière première à gaspiller. Nous sommes les gardiens de cette biodiversité. Protéger, diffuser, transmettre ce patrimoine génétique et horticole constituent bien les objectifs que s’est fixés le CCVS.
À la fin des années 1980, une poignée de passionnés constatait que de nombreuses espèces et variétés de plantes disparaissaient de façon irréversible. De cette rencontre entre scientifiques et amateurs éclairés naît le CCVS, fondé en 1989 par dix co-fondateurs autour de Jean Laborey qui devient son premier président. Reconnu d’intérêt général, le CCVS s’est donné pour mission de préserver les plantes ressources menacées de disparition et qui constituent le réservoir génétique de la biodiversité sur Terre. Il défend aussi l’importance des collections ex situ en les replaçant dans le contexte sociétal et culturel actuel, à égalité avec les collections in situ.
Le CCVS encourage les vocations de collectionneurs, recense les collections végétales et les évalue à travers l’attribution d’un label en deux temps : « Collection agréée CCVS », susceptibles de s’enrichir pour obtenir le label « Collection nationale CCVS », remplissant des critères d’excellence lors de son évaluation. L’expertise et le suivi des collections végétales sont assurés par le Comité des collections qui soumet son analyse au Conseil scientifique, lequel fait ses propositions au Conseil d’administration. Plus de 380 collections végétales spécialisées sont aujourd’hui labellisées en France par le CCVS, qui tient à jour une carte accessible sur son site, où les collections sont répertoriées par régions. Par ailleurs, le CCVS a été sollicité pour apporter sa contribution à la création et au travail de la section RPG (ressources phyto-génétiques) du CTPS (Comité technique permanent de la sélection). Il a été déclaré comme « tête de réseau des gestionnaires de collections » au Journal Officiel. Il s’est engagé à créer un fonds de dotation « Collections et biodiversité », dont l’objectif principal est de trouver les financements destinés à la préservation et au développement des collections. Il réunit des représentants de filières de production et des associations autour d’une même ambition : partager la biodiversité cultivée pour mieux la préserver. L’abondement du fonds repose essentiellement sur le mécénat. Il est destiné à soutenir les actions portées par des structures d’intérêt général.
Défendre le rôle patrimonial des collections
Le CCVS œuvre aussi auprès des différentes instances pour défendre le rôle patrimonial de ces collections. Il s’agit de faire valoir que les ressources phyto-génétiques du PVV constituent des éléments de résilience et des réponses innovantes aux différents défis, tant climatiques qu’économiques et sociétaux.
Préserver ces trésors botaniques et cultivés conduit aussi au concept d’héritage, celui laissé aux générations suivantes, issu des générations de jardiniers, des grands botanistes et explorateurs et, plus près de nous, des hybrideurs émérites… Au XVIIIe siècle, s’était ouverte en Europe une phase sans précédent d’introduction et de diffusion des plantes nouvelles, prélude au siècle d’or de l’horticulture française couronné par la création de la SNHF. Les expositions internationales du XIXe siècle ont favorisé ces échanges. Faire vivre cette mémoire collective participe aux enjeux actuels.
Un manifeste pour la défense du Patrimoine végétal vivant
Le CCVS s’est engagé dans une démarche de reconnaissance officielle, nationale et européenne d’un label PVV. Ce label a pour objectif de sensibiliser nos contemporains à l’importance des plantes en tant qu’êtres vivants et comme marqueurs culturels de l’histoire de l’humanité. À l’instar des mesures de protection mises en place pour le patrimoine bâti, le label PVV permettra de solliciter divers financeurs nationaux et européens afin d’abonder le fonds dédié et de lancer des projets de sauvegarde et de transmission. Pour les donateurs, les avantages seront nombreux : allégement des charges fiscales pour toute personne physique ou morale finançant tout ou partie d’une collection végétale à titre professionnel ou bénévole, inscription comptable dans les immobilisations, allégements fiscaux lors de la transmission. Le label PPV sera accompagné d’une mention dans les documents de communication, d’une signalétique par un logotype spécifique, repris sur les documents de com munication et de promotion touristique et culturelle, ainsi que dans les documents d’aménagement du territoire ou d’urbanisme…
La démarche de reconnaissance du PVV conduit aussi des acteurs à une redécouverte de leur propre territoire, comme les collections du Jardin botanique de la Ville de Paris, au nombre de dix-sept, qui ont su, lors des expositions internationales, représenter la France au meilleur niveau. Elles sont un des outils de son Plan local d’urbanisme bioclimatique (PLU bioclimatique). Œuvrons toutes et tous à la défense de notre Patrimoine végétal vivant, trésor botanique et horticole, forme de compagnonnage équilibré entre l’humanité et les plantes, plus que jamais d’actualité. Chacun peut d’ailleurs signer ce manifeste « Patrimoine végétal, patrimoine capital » sur le site internet du CCVS : www.ccvs-france.org/manifeste
Françoise Lenoble-Prédine
Présidente d’honneur du CCVS
Luc Vandevelde
Président du CCVS
(1*) Conservatoire des collections végéatales spécialisées : https://www.ccvs-france.org/universite-2023/