Maladies de carence et consommation de riz
Daniel Lejeune
Le riz est la deuxième céréale la plus consommée dans le monde, derrière le maïs et devant le blé. Il entre dorénavant dans la cuisine de tous les continents mais ce sont dans les contrées extrême-orientales que sa contribution alimentaire est la plus massive. On conçoit donc aisément l’impact direct de ses qualités nutritionnelles sur la santé des populations concernées.
La carence alimentaire en vitamine B, vitamine indispensable au métabolisme des sucres, cause une insuffisance cardiaque et des troubles neurologiques.
Dès 1630, Jacob de Bondt, médecin néerlandais en poste à Java observa de fréquents symptômes d’affaiblissement musculaire (« je ne peux pas, je ne peux pas » ou « béribéri » en cinghalais). En 1873, Van Lent eut l’idée de diminuer la part de riz dans l’alimentation des marins hollandais et obtint de bons résultats. Il fallut toutefois attendre 1897 pour que Christiaan Eijmann, installé à Batavia, constatant des polynévrites chez des poulets et des pigeons nourris au riz poli, ait l’intuition de la nature du béribéri humain, dont la cause réside dans la consommation exclusive de ce riz privé de ses enveloppes lors du polissage. Ses travaux lui valurent un prix Nobel en 1929. L’identification de la Thiamine, connue aussi sous le nom de vitamine B1, sera accomplie en 1936 par Robert R. William.
Cécité et mortalité précoce
La carence en vitamine A, ou bêta-carotène, essentielle de son côté au métabolisme général, est spécialement impliquée dans la croissance des os et dans la synthèse des pigments de l’œil. Les jeunes enfants chroniquement carencés en vitamine A du fait d’une alimentation insuffisamment variée, notamment dans les pays en développement, sont victimes de cécité et de mortalité précoce (250 000 enfants concernés annuellement au bas mot). A défaut de pouvoir changer rapidement les habitudes alimentaires des populations concernées, deux chercheurs, Ingo Potrykus, de l’Institut fédéral de technologie Suisse, d’une part et Peter Beyer ont réalisé avec le soutien de la fondation Rockfeller, une modification génétique du riz, lui permettant de synthétiser directement le bêta-carotène. Ainsi, la consommation régulière de ce nouveau riz, baptisé « riz doré » en raison de la couleur de son grain, peut prévenir l’apparition de cette grave maladie de carence. Espérons que les opposants à la modification génétique des plantes s’inclineront devant ce beau résultat et que les considérations de santé publique pourront l’emporter sur celles d’un intégrisme idéologique.
A lire …
Enquête sur le riz doré, donné dans le numéro 307 (janvier 2014) de la revue Science et pseudosciences, une publication qui instruit ses investigations d’une manière objective et équilibrée.