Les cueillettes de plantes à parfum en France
Christophe Sireyjol
Le narcisse du poète (Narcissus poeticus) et La jonquille (Narcissus pseudo-narcissus) sont des plantes vivaces à bulbe de la famille des amaryllidacées. Dès le mois d’avril, les feuilles se développent avant l’apparition en mai des hampes florales. Jonquille et narcisse du poète croissent dans les prairies de fauche de moyenne montagne sur des sols acides et humides. Les zones de récolte sont aujourd’hui concentrées dans le massif central (Lozère, Cantal, et Haute Loire) l’Aubrac étant une des principales zones de collecte. On en rencontre aussi dans la région du Capcir (Pyrénées orientales), ou du Bugey (Ain).
Techniques de récolte
Le parfum se trouve exclusivement concentré dans les fleurs. La récolte de la jonquille débute en mai, elle se poursuit par celle du narcisse qui se termine les premières semaines de juin. Jonquille et narcisse vivent au milieu d’une communauté d’espèces sauvages. La récolte consiste donc à cueillir la tête des fleurs, sans couper de feuilles, ni d’autres espèces végétales.
Si la cueillette à la main a été pratiquée lors des premières récoltes (1945 – 1955), elle a très rapidement été remplacée par des dispositifs de plus en plus élaborés afin de diminuer sa pénibilité et augmenter sa productivité.
Le premier outil de cueillette se présente sous la forme d’un râteau ou peigne de 30 cm de large disposé horizontalement au bout d’un manche. Le cueilleur balance le râteau devant lui pour «faucher » les têtes des fleurs juste en dessous de l’ovaire.
Soucieux de maintenir durablement cette cueillette, la société IFF/LMR NATURALS a travaillé à la mise au point de prototypes spécifiques à cette cueillette afin de
diminuer encore la pénibilité, maintenir la qualité de la fleur cueillie, respecter la ressource naturelle sauvage sans altérer la récolte de fourrage à venir sur la prairie, cueillir rapidement à l’optimum de la floraison. Le résultat est une « cueilleuse de poètes » automotrice.
Alors qu’un peigne permet de récolter 30 à 50 Kg, un chariot 100 à 200 kg, les récolteuses dépassent 500 kg par jour. Aujourd’hui, la cueillette au peigne a presque disparu, mais la récolte continue de se pratiquer avec les différents outils. Ce type de cueillette est sans conséquence sur le maintien de l’espèce et la récolte de l’année suivante . On peut cueillir 200 t les bonnes années.
Technique d’obtention de l’extrait
La cueillette de la journée est aussitôt transportée à l’usine d. Les fleurs sont rapidement concentrées en concrète par extraction avec un solvant volatil. Cette concrète est ensuite transformée en absolue à Grasse par dissolution dans l’alcool, filtration à 0°C et concentration sous vide. De 1 500 à 2 000 kg de fleurs sont nécessaires pour obtenir un kg d’absolue qui se retrouvera sur l’orgue du parfumeur pour composer des parfums. Dernier créé, « Narcisse bleu » d’Hermès.
La cueillette du lichen
Les forêts de conifères sont fréquentes dans le massif central. Les pins sylvestres y tiennent une large place et ont leur tronc et branches fréquemment recouverts de Parmelia furfuracea.
Son emploi en parfumerie remonte au XVème siècle. La cueillette du lichen est principalement pratiquée en Auvergne, plus précisément en Margeride, où on le nomme « mouse d’arbre ». Le lichen peut se cueillir toute l’année mais il est néanmoins préférable de le collecter durant l’hiver, par temps sec. Les branches supportant les lichens sont cassées avec des crochets ou des griffes et entassées dans des sacs en toile de jute. Une personne peut ainsi ramasser jusqu’à 80 kg par jour. Le lichen pousse d’environ 1 centimètre par an, les cueilleurs ne reviennent pas avant 4 à 5 ans sur un même site.
Alors qu’elle atteignait 2 000 tonnes dans les années 1990, cette récolte dans le Massif Central, est inférieure aujourd’hui à 500 tonnes. Résultat des réglementations restrictives de l’IFRA[1] quant à la présence de constituants potentiellement allergènes.
Cent vingt-cinq kg de lichen sont nécessaires pour obtenir quatre kg d’absolue.
Citons enfin la cueillette du mimosa (Acacia dealbata) qui a toujours cours dans le massif du Tanneron près de Grasse en Février et Mars.
Des matières premières uniques
Toutes ces cueillettes sont pratiquées par des personnes cherchant un complément de revenu, rarement pas des professionnels à cause de leur nature aléatoire.
Avec le retour en force de l’intérêt pour les produits naturels, les travaux entrepris pour maintenir ces filières durablement sont essentiels pour continuer à offrir des matières premières uniques aux parfumeurs.
A lire …
- Cueillir la montagne, Plantes, fleurs champignons en Gévaudan, Auvergne, Cévennes et Limousin de R. Larrère et M. de la Soudière (1987)
- Avenir de la cueillette de la gentiane, du narcisse et du lichen dans le centre du Massif Central, de Cécile Dransart, Jocelyne Ferriol, Cynthia Gandour et Stéphane Montiel (1996)
[1] International Fragrance Association
Bonjour,
Dans ma vallée, il y a des prés blancs de narcisses. Puis je les cueillir, n étant pas propriétaire?
Les montagnes sont recouvertes de genêts et l hiver il y a énormément de lichen…
Cela pourrait être un complément de retraite?
Je sais que c’est recherché pour les parfums. À qui dois je m’adresser?
Je vous souhaite une très belle journée .
Madame Christine Roulleau.