La Vallée-aux-Loups : Chateaubriand en son jardin
« Une chaumière » qui ressemble à un ermitage, c’est ainsi que Chateaubriand décrit sa nouvelle acquisition en 1807, dans ses Mémoires d’outre-tombe. Dans la quiétude de sa « chère Vallée », au pied de ses arbres, il puise son inspiration, imagine ses personnages et commence à écrire ses mémoires. Cette vallée, c’est la Vallée-aux-Loups, dans le Val d’Aulnay, à Chatenay-Malabry (92).
Marquer son domaine comme il a écrit sa vie : la patte de Chateaubriand
Quand il s’installe dans la maison qu’il vient d’acquérir à la Vallée-aux-Loups, Chateaubriand choisit de conserver le mobilier modeste du précédent propriétaire, un jardinier, mais il souhaite marquer de son empreinte son nouveau domaine. Il fait donc édifier un portique supporté par deux cariatides en marbre blanc sur la façade et installe un superbe escalier de bateau à double branche.
Mais sa patte est surtout perceptible dans le parc du domaine, dans lequel il passera de nombreuses heures à jardiner pendant les dix ans où il résidera à la Vallée-aux-Loups. Chateaubriand le modèle, l’aménage à la manière d’un paysagiste, et fait réaliser des travaux de nivellement, tracer des allées puis « plante et déplante, tant qu’il peut », comme le constate son épouse Céleste. Pour obtenir des plants, il fait appel à ses relations et à des pépiniéristes de renom, jusqu’à l’ex-impératrice Joséphine, qui lui remet un magnolia à fleurs pourpres de ses serres de la Malmaison. Loin des modes paysagères de son temps, il conçoit un parc littéraire où chaque essence est choisie soigneusement, souvent en lien avec les contrées visitées par cet infatigable voyageur.
L’écrivain dessine lui-même son parc, d’une dizaine d’hectares, et y plante des arbres qui lui rappellent ses voyages : un marronnier d’Inde de 31 mètres de haut, bien plus grand que la moyenne de son espèce, un cyprès chauve de Louisiane et un tulipier de Virginie, un cèdre du Liban et un cèdre bleu d’Algérie, tous deux comptant près d’une centaine d’années, un catalpa de Louisiane unique au monde, dont les branches, étalées au sol sur près de 400 mètres carrés, ont pris racine pour devenir des troncs tentaculaires et former un véritable tableau poétique.
Un homme passionné par ses arbres
Chateaubriand voue une véritable passion à ses arbres, leur parlant comme à sa famille ainsi qu’il l’écrit dans ses Mémoires d’outre-tombe : « Je suis attaché à mes arbres : je leur ai adressé des élégies, des sonnets, des odes. Il n’y a pas un seul d’entre eux que je n’aie soigné de mes propres mains, que je n’aie délivré du ver attaché à sa racine, de la chenille collée à sa feuille ; je les connais tous par leurs noms comme mes enfants : c’est ma famille, je n’en ai pas d’autre, j’espère mourir auprès d’elle. »
Les fleurs ne sont pas en reste dans ce « Jardin remarquable » où l’on peut admirer de grands massifs de rhododendrons, un magnolia à fleurs pourpres ou le rosier Chateaubriand créé par Michel Adam.
C’est cette empreinte toute personnelle qui fait aujourd’hui du domaine de la Vallée-aux-Loups une maison d’écrivain singulière, fortement marquée de la présence de l’auteur. Classée Monument historique et désormais propriété du Département des Hauts-de-Seine, la Maison de Chateaubriand se visite toute l’année et propose des expositions, conférences, spectacles et autres activités culturelles. Des visites « à deux voix » proposent régulièrement un parcours aussi bien historique que botanique pour découvrir les richesses du parc et de la maison (programme détaillé sur http://www.vallee-aux-loups.hauts-de-seine.fr/).
Au détour de votre visite, ne manquez pas de faire une petite pause gourmande au salon de thé niché au creux du jardin (ouvert du mercredi au dimanche).
Amélie Chabuet
Responsable du service de presse du Conseil général des Hauts-de-Seine