La production mondiale d’épices
Nadine Garcia-Bastida
La culture des épices s’est répandue sous l’influence des empires coloniaux. Ainsi, le poivre a conquis toute l’Asie du Sud-Est, l’Océan Indien et l’Amérique du Sud. La vanille et la cardamome se sont développées entre l’océan indien et l’Amérique du Sud et les piments ont parcouru le chemin inverse d’Amérique Centrale vers l’Asie. Chaque épice a souvent une histoire particulière, comme le clou de girofle indonésien qui est essentiellement autoconsommé dans des cigarettes aromatisées (kratak).
Le marché mondial des épices importées est vaste, évalué à quelque US$ 4 milliards.
Il faut distinguer à cet égard plusieurs types de pays selon leur position sur les marchés :
- les pays producteurs gros consommateurs. C’est le cas de l’Inde pour beaucoup d’épices, de l’Indonésie pour le clou de girofle ou la vanille, le Mexique pour les piments, etc. Une faible partie de la production est mise en vente sur le marché international.
- les pays exportateurs comme la Chine, le Vietnam, Madagascar, la Turquie, le Guatemala, le Brésil
- les pays occidentaux ayant eu un empire colonial (France, l’Angleterre, la Hollande, la Belgique), sont restés des plaques tournantes du commerce des épices, spécialisés selon l’origine nationale des produits. Ces pays sont donc des exportateurs importants, surtout parce qu’ils réexportent les matières premières importées.
Ainsi le France s’approvisionne en poivre à hauteur de 76 % auprès du Viêt-Nam, en Vanille et en girofle respectivement à hauteur de 83% et de 47% à Madagascar.
De même le Royaume-Uni est livré à 56 % en graines d’anis et de badiane par l’Inde, tandis que L’Inde et le Viêt-Nam lui fournissent chacun 20% du marché en poivre et piments séchés.
51 % des approvisionnements en noix de muscade et 76 % des approvisionnements en Cannelle des Pays bas proviennent d’Indonésie
- les plaques tournantes commerciales : Singapour et Hong Kong occupent une place spéciale sur ces marchés, de monopole pour certains produits (ginseng).
- les pays importateurs : on y retrouve l’ensemble des pays développés (Etats-Unis, Union Européenne, Japon…) qui consomment la plus grande part de ces produits ou qui les réélaborent en mélanges industriels complexes.
Une hausse de la consommation
Les opérateurs commerciaux sont très divers : il s’agit par exemple de distributeurs de détail qui ont une activité de négoces de gros (Mac Cormick, Amora), d’épiciers polyvalents (Tang)…
De plus, même si les situations historiques restent dominantes, elles évoluent avec la modification des formes de consommation moins traditionnelles des épices. De nouveaux acteurs émergent comme la Chine ou l’Amérique du Sud. Cette dernière fournit quasi-exclusivement le marché des États Unis, à tel point que les mêmes noms qu’en Europe sur les produits ne concernent parfois pas les mêmes espèces.
Les importations réalisées par l’Union Européenne sont relativement faibles au vu des volumes échangés dans le monde à l’exception de la vanille pour laquelle l’Union Européenne représente 47 % des importations mondiales et la France 14 %.
Cependant, ces importations ont enregistré une progression constante entre 2008 et 2012 notamment pour le gingembre (+ 75 %), la vanille (+ 45 %), la cannelle (+ 24 %) et le girofle (22 %) tandis que la muscade recule de 6 %.
Ces progressions peuvent s’expliquer par une tendance de consommation de produits ethniques : utilisation des épices par l’industrie agroalimentaire proposant des plats cuisinés de diverses origines notamment orientales, et l’engouement des consommateurs pour la cuisine « venue d’ailleurs ». La hausse de la consommation d’épices s’explique aussi par la population immigrée en Europe qui a conservé ses habitudes culinaires.