Groupe Allavoine : La plante et le sol, un mariage de raison

Jean-François Coffin

Offrir des végétaux adaptés aux sols de ses clients, à savoir ceux d’Ile de France, est la base de la démarche du groupe Allavoine. Car planter localement des plantes élevées dans la région est un gage de leur adaptation et de la réussite de leur croissance.

Plantations réalisées par Allavoine à Bois-Colombes - © E. Moinard
Plantations réalisées par Allavoine à Bois-Colombes – © E. Moinard

« Nos sols sont de nature plutôt basique, argilo-limoneuse. Et s’ils ne sont pas adaptés à tous les végétaux on peut accoutumer ces derniers aux sols », explique Éric Moinard directeur du groupe Allavoine dont l’activité est la production de végétaux de pépinières et la réalisation d’espaces verts en Île-de-France.

Il cite l’exemple du Magnolia x soulangeana qui exige un pH acide, habituellement planté en terre de bruyère. « A partir de sujets de petite taille en conteneurs, nous les plantons en pleine terre dans un sol amendé en terre de bruyère. Il ne faut pas s’alarmer si sa croissance est un peu ralentie par rapport à un substrat idéal. Il s’adaptera progressivement et il ne rencontrera pas de problèmes lorsqu’on le transplantera dans un sol dont la nature sera proche de celle de nos terres. Par cette pratique, nous n’avons d’ailleurs jamais constaté de problèmes de chlorose notamment. »

L’entreprise Allavoine tente de faire comprendre l’intérêt de cette technique aux paysagistes qui exigent un substrat 100 % terre de bruyère. « Cette composition n’est pas l’idéal car elle risque, par la suite, de poser des problèmes de sécheresse. Nous leur proposons une plantation dans un  mélange 50/50 terre de bruyère/terre argilo-limoneuse. L’expérience également avec les rhododendrons et les azalées montre que cela se passe très bien. »

Exemple de plantations réalisées sur un substrat amendé en terre de bruyère mais non à 100 % selon la technique « Allavoine » - © E. Moinard
Exemple de plantations réalisées sur un substrat amendé en terre de bruyère mais non à 100 % selon la technique « Allavoine » – © E. Moinard

Enrichir le sol sans le dénaturer

Avant un chantier en pleine terre, l’entreprise est parfois amenée à procéder à des sondages. « Mais, la plupart du temps, nous avons affaire avec des sols de nature proche de celle où ont été élevés nos végétaux. Si la terre ne convient pas, on peut toujours rectifier sa composition. »

Avant une plantation, le sol est enrichi par un apport de matière organique « mais nous n’en changeons pas sa vraie nature. » L’apport provient du compostage des déchets de tonte, des feuilles et rameaux issus de la taille des haies et de l’élagage des arbres. Deux fois par an, les déchets verts sont passés au broyeur, puis triés en fonction de leurs granulométries. « Ce recyclage de compost est destiné à améliorer la terre que nous avons en stock mais aussi à amender les sols de chantiers de grande envergure. Quand nous livrons de la terre végétale, nous ajoutons une couche de 10-15 cm de compost. Ce mélange, réalisé à l’aide d’un rotavator, permet, outre l’apport de matière organique, l’enrichissement microbien de terres dont on ne connait pas forcément l’état. »

Avant la plantation, la terre peut être amendée si elle ne convient pas mais sans en changer sa vraie nature – © E. Moinard

Le problème des « sols hors sol »

Le cas est problématique pour les toitures végétalisées, une vraie demande en constante augmentation depuis une dizaine d’année. « Elles ont souvent été accaparées par des étancheurs qui ont surfé sur des techniques minimalistes proposant, par exemple, des tapis de sedum sur quelques centimètres de terre végétale. Vision à court terme car quid de la pérennité, de l’évolution de ces surfaces qui se modifient avec l’apport de graines par les oiseaux qui germeront et donneront à terme l’aspect calamiteux d’un mélange de végétaux non maîtrisé ? Sans compter sur la nature et l’épaisseur du substrat qui ne sont guère appropriés à cette évolution… »

Dans le cas des jardins sur dalle où il faut une épaisseur de terre d’au moins 40 à 50 cm, à condition que la portance soit prévue à l’origine, il est très important de bien choisir les végétaux, en tenant compte de l’évolution de leurs racines. Par exemple, pas question de mettre des frênes ou des bambous sur une dalle béton !**

Des végétaux adaptés au sol

« Nous rencontrons parfois des problèmes de nature de végétaux demandés en contradiction avec la nature du sol où ils seront plantés. Nous avons un devoir de conseil. Si un paysagiste nous demande un Quercus palustris qu’il trouve séduisant par son feuillage pour le planter en zône sèche alors que ce végétal nécessite, comme son nom l’indique, une certaine humidité, nous l’alertons sur le danger qu’il court, entraînant par la suite l’insatisfaction du client. » Certains paysagistes demandent parfois, lors de la réalisation d’un jardin, des espèces ou variétés que l’on ne trouve qu’à l’étranger. « Nous leur conseillons de choisir une variété proche cultivée et disponible dans la région. »

Les atouts du local

Les végétaux cultivés dans des conditions pédo-climatiques proches de celles de leur destination auront davantage de chance de réussite - © E. Moinard
Les végétaux cultivés dans des conditions pédo-climatiques proches de celles de leur destination auront davantage de chance de réussite – © E. Moinard

Les clients d’Allavoine sont donc, pour la plupart, des particuliers, des collectivités locales, des promoteurs, … de la région parisienne où les natures de sol sont comparables à celles de la pépinière. Pour mieux répondre à leurs demandes et leur proposer une offre riche et importante, l’entreprise a créé avec des collègues le GIE les Pépinières Franciliennes*. « L’objectif est de pouvoir fournir, outre la quantité demandée, des végétaux élevés sur des  de sols et dans des conditions climatiques proches garantissant une meilleure reprise lors de plantations dans notre région, au lieu d’aller s’adresser en Allemagne ou aux Pays-Bas. »

Et Éric Moinard de déplorer l’exemple du plateau de Saclay où toute une première opération immobilière est en cours, dans un esprit de respect de l’environnement et écologique. « Il faudrait que la proximité soit également prise en compte comme critère d’attribution dans les marchés, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui et je le déplore, car c’est pourtant une logique éco-responsable et durable évidente que prône la plupart des Maîtres d’ouvrage. L’avantage est d’éviter un transport coûteux, d’avoir des végétaux adaptés aux conditions pédoclimatiques locales et de mettre en pratique un partenariat avec des entreprises locales. »

Anticiper pour réussir

Certes, en France il y a une pénurie d’arbres de grande taille, notamment des persistants. L’idéal serait de prévoir bien en amont du projet les besoins pour passer des contrats de culture avec les producteurs locaux afin d’avoir, au moment de la réalisation de l’espace vert, des végétaux de taille raisonnable adaptés aux sols locaux. Mais les promoteurs, les collectivités locales, les concepteurs même arrivent rarement à anticiper ou n’en ont pas les moyens. On oublie que l’on travaille avec du vivant et on n’a plus la patience d’attendre… « Hélas, on veut tout, tout de suite et tout gros et on a trop tendance à demander au sol de s’adapter aux végétaux alors que ce devrait être le contraire ! »

Le groupe Allavoine en bref

Éric Moinard, directeur Ingénieur agronome ENSA Montpellier Ingénieur diplômé de l’ENSH Versailles

Éric Moinard, directeur
Ingénieur agronome ENSA Montpellier
Ingénieur diplômé de l’ENSH Versailles

  • 1926, création de la pépinière Allavoine après le rachat de l’entreprise horticole Chauffour à Jouy en Josas (Yvelines)
  •  1953, création de l’activité « Espaces verts Parcs et Jardins » avec des services personnalisés d’aménagements et d’entretien vers les collectivités.
  •  1995, création de « Services jardins » pour les particuliers

Aujourd’hui, Éric Moinard est le Directeur du groupe

Allavoine Pépiniériste-Producteur- Paysagiste
4, route de Favreuse
91570 Bièvres

www.allavoine.com

* http://pepinieres-franciliennes.com

** voir dans notre dossier l’encadré d’Olivier Damas sur les substrats pour toitures et terrasses végétalisées

voir aussi notre dossier « murs, toitures, verdures » n°629

 

> Télécharger le PDF