Eclairgeons et mesclun: des cultures régionales
Elie Dunand
Le Mesclun, typiquement Niçois
Le mesclun vient du niçois mesclar qui signifie à mélanger ..
On raconte qu’au XIXe siècle, les pères franciscains du Monastère de Cimiez étaient si pauvres qu’ils n’arrivaient même pas à semer une rangée de laitues avec le même type de graines. Dans les jardins du monastère qui surplombe Nice, ils ramassaient, au gré des récoltes, quelques jeunes pousses de salade auxquelles ils mélangeaient de la roquette sauvage et du pissenlit qui croissaient sur le bord des allées pour les offrir aux habitants qui leur faisaient aumône.
Six variétés de salades
Le Mesclun est un mélange de jeunes salades typiquement niçois qui, à l’origine, contenait des laitues grasses, des romaines, des chicorées et des herbes (pissenlit, roquette, cerfeuil).
En principe, le mesclun est de couleur verte, le rouge et le blond sont des adaptations très récentes. Aujourd’hui, pour respecter la recette de l’authentique mesclun niçois, le mélange doit contenir du cerfeuil et six variétés de salades dont la roquette obligatoirement. La composition du mesclun varie tout au long de l’année, sauf pour le cerfeuil et la roquette.
Ainsi, peuvent être mélangés en complément des salades, du pourpier, des jeunes pousses d’épinard et du mizuna (Brassica rapa nicossinica) au grè des saisons.
Pour une meilleure gestion des levées et de la croissance, toutes les variétés sont semées séparément, mais pour plus de simplicité au semis et à la coupe, il est possible de semer les laitues ensemble. Le semis direct peut être remplacé par du semis en motte pressée (4 cm x 4 cm) sur plaque alvéolée pour des plantations sous serre et abri en période plus froide.
La récolte se fera au stade d’environ trois feuilles, soit 25 à 28 jours après le semis. La hauteur de coupe respectera toujours 4-5 cm pour favoriser le départ de nouvelles feuilles. Ainsi, plusieurs coupes successives seront possibles selon la saison, avec au maximum cinq coupes sur un cycle d’environ 4-5 mois pour les fines herbes, mais une à deux coupes pour les laitues et les chicorées en raison du risque de montaison précoce.
Les éclairgeons, de Lyon à Saint-Étienne
A l’origine, les éclairgeons sont des « plançons » (plants) de batavia de semis direct, non repiqués, ayant atteint à l’éclaircissage un stade de développement de plus de 4 feuilles et récoltés entre 80 et 100 grammes. Cette pratique était propre aux variétés qui passent l’hiver au stade de plantules, sans l’artifice d’un abri ou d’une serre. En région lyonnaise, ainsi que dans la Loire, vers Saint-Etienne, c’était traditionnellement une production de fin d’hiver-printemps liée à celle des laitues précoces, notamment des batavias dérivées de la Rouge grenobloise.
Les semis se font en plein air, en planches, à une densité d’environ 25-30 graines au mètre linéaire, avec des interlignes de 15-20 cm. Ils peuvent être échelonnés dans le temps, de mars à début mai et de septembre à octobre. Aujourd’hui, les variétés de rougette, entre autres, sont bien adaptées à ce mode de culture de plein air en hiver et sont appréciées pour leur haute qualité gustative.
Réussir le semis direct
Pour la grande majorité des espèces, la profondeur de semis est de 5 mm, sauf pour les petites graines comme la roquette sauvage où le semis est en surface. Tous les semis sont systématiquement roulés et pour, une meilleure homogénéité de levée, il est recommandé de recouvrir le semis d’un lit de sable de 3 mm d’épaisseur et de poser un voile agro-textile pour une levée plus rapide et homogène.
Une culture délicate
Le Mesclun et les éclairgeons se développeront mieux en terre de texture légère et humifère qui permet un ressuyage et un réchauffement du sol optimum. Un délai de retour de 4 ans est nécessaire de manière à éviter les maladies de sol fréquentes en phase de levée (Pythium sp, Rhizoctonia, solani, Sclerotinia sp, etc.).
Contre les fontes de semis, on évitera tout apport de matière organique fermentescible ou tout enfouissement de matière verte juste avant le semis.