Des Ombellifères pour le plaisir des yeux

Au jardin d’ornement, plusieurs Apiacées peuvent figurer en bonne place, même si, pour en dénicher certaines, il faut produire quelque effort. Elles peuvent, d’une part, apporter des parfums souvent anisés et musqués. D’autre part, leur silhouette le plus souvent spectaculaire et structurante donne beaucoup d’allure au jardin et aux bouquets de fleurs. Enfin, toutes sont très mellifères, pour la joie de nombreux insectes.

L’ombelle couronnée de grands pétales bifides, visuellement très attractifs pour les pollinisateurs, et par là décoratifs, de l’orlaya à grandes fleurs (Orlaya grandiflora)
L’ombelle couronnée de grands pétales bifides, visuellement très attractifs pour les pollinisateurs, et par là décoratifs, de l’orlaya à grandes fleurs (Orlaya grandiflora) © J.-P. Reduron

L’effet dense ou volumineux de certaines Apiacées

La podagraire panachée (Aegopodium podagraria variegata) forme des peuplements denses type couvre-sol et fait montre de ses feuilles tachées et bordées de crème. L’archangélique officinale (Angelica archangelica), plante volumineuse qui peut atteindre 3 mètres, remplacera avec bonheur la berce géante, désormais proscrite à cause de son caractère vésicant. La grande astrance (Astrantia major) avec ses fleurs serrées en ombelle compacte simulant une seule fleur, entourée de bractées allongées et colorées (blanches ou roses), est du plus bel effet. Les panicauts (Eryngium), à allure de chardons, offrent plusieurs espèces remarquables comme le panicaut bleu (E. planum) et ses multiples têtes florales bleu vif, le panicaut à feuilles de yucca (E. yuccifolium) et le panicaut à feuilles d’agave (E. agavifolium), étonnants par leurs grandes rosettes de feuilles étroitement allongées bordées d’épines et leurs inflorescences portant de robustes faux capitules.

À GAUCHE : Podagraire panachée (Aegopodium podagraria variegata), une plante tapissante décorative et occupant bien l’espace © J.-P. Reduron. À DROITE : Herbe-au-cure-dent (Visnaga daucoides), présente une ombelle en fruit, originale par les rayons resserrés et son involucre de bractées finement découpées à la base
À GAUCHE : Podagraire panachée (Aegopodium podagraria variegata), une plante tapissante décorative et occupant bien l’espace © J.-P. Reduron. À DROITE : Herbe-au-cure-dent (Visnaga daucoides), présente une ombelle en fruit, originale par les rayons resserrés et son involucre de bractées finement découpées à la base © J.-P. Reduron

Les Ombellifères annuelles

Parmi les annuelles, on peut employer l’herbe-au-cure-dent (Visnaga daucoides) au feuillage finement découpé et ses ombelles blanches arrondies en dôme (faire attention aux risques d’allergies cutanées), tout comme l’orlaya à grandes fleurs (Orlaya grandiflora) aux ombelles blanc pur bordées de grands pétales périphériques bifides, très attractifs. On pourrait ajouter à cette gamme le peucédan d’Alsace (Xanthoselinum alsaticum), pour sa haute stature et ses multiples ombelles jaunes formant pyramide, ou l’équivalent sous climat méditerranéen, la férule commune (Ferula communis) au feuillage capillaire et aux fleurs jaune vif. Le grand boucage à fleurs roses (Pimpinella major var. rubra) est une belle vivace vigoureuse, très élégante, supportant bien la mi-ombre.

Grande astrance (Astrantia major) très décorative par ses ombelles pourvues d’un grand involucre entourant de multiples petites fleurs blanches ou rosées
Grande astrance (Astrantia major) très décorative par ses ombelles pourvues d’un grand involucre entourant de multiples petites fleurs blanches ou rosées © J.-P. Reduron
Panicaut bleu (ou panicaut à feuilles planes) (Eryngium planum) avec son ombelle transformée ressemblant à un chardon et nommée « pseudocapitule ». Très attractive par ses fleurs bleu vif pour les pollinisateurs et les jardiniers
Panicaut bleu (ou panicaut à feuilles planes) (Eryngium planum) avec son ombelle transformée ressemblant à un chardon et nommée « pseudocapitule ». Très attractive par ses fleurs bleu vif pour les pollinisateurs et les jardiniers © J.-P. Reduron
Archangélique officinale (Angelica archangelica) robuste plante élevée, de grande prestance, aux feuilles à segments ovales et grande ombelle globuleuse. Attention aux réactions cutanées de contact pour certaines personnes
Archangélique officinale (Angelica archangelica) robuste plante élevée, de grande prestance, aux feuilles à segments ovales et grande ombelle globuleuse. Attention aux réactions cutanées de contact pour certaines personnes © J.-P. Reduron

 

Au jardin : semer ou planter

Ces différentes plantes peuvent se trouver sous forme de semences ou de plants.

Certaines espèces ont fait l’objet de sélection pour les rendre encore plus attractives comme la variété d’Eryngium ’Big Blue’, qui est issue d’un croisement entre l’E. alpinum et l’E. bourgatii.

Elles sont considérées par les horticulteurs de métier comme l’un des « chardons » bleus les plus décoratifs. Il existe différentes variétés ornementales d’Astrantia major.

Selon les espèces, les semis s’avèrent très faciles à délicats. Les graines de la famille des Apiacées sont souvent dormantes au moment de la « maturité-récolte », autrement dit, au moment de leur dispersion.

 

 


La dormance s’exprime à travers plu
sieurs mécanismes : une dormance morphologique, par exemple, des embryons immatures qui ont besoin de temps pour se développer avant que la graine puisse commencer à germer, ou encore une dormance de type physiologique.

Différentes combinaisons et durées de stratification chaude et froide peuvent être nécessaires en fonction des espèces considérées. Les Eryngium alpinum, par exemple, demandent un traitement de vernalisation à 15 °C et une période de semis se situant plutôt entre août et novembre. Pour Angelica archangelica, il est possible de mettre les graines une semaine au congélateur. Selon les espèces, la durée de germination peut être longue et excéder quarante jours. Souvent les Apiacées sont assez peu exigeantes pour la nature du sol. Il faut cependant généralement les éviter trop argileux et tenir compte des conditions d’exposition, qui vont de plein soleil à l’ombre. Attention, certaines de ces espèces peuvent devenir envahissantes.

 

Jean-Pierre Reduron
Ingénieur horticole, botaniste, fondateur du Conservatoire botanique de Mulhouse, spécialiste des Apiacées

François Villeneuve
Ingénieur honoraire du CTIFL, membre du Comité de rédaction de Jardins de France