Des clés pour Jardiner Autrement
Laure Derail
Lancé en 2008 à la suite du Grenelle Environnement, Ecophyto 2018[1] est un plan d’action national qui vise à réduire progressivement l’usage des pesticides, de 50 % si possible, d’ici à 2018…
Avec 61 900 tonnes de substances actives utilisées en 2010, la France est le premier consommateur européen de pesticides (UIPP, 2012). Moins de pesticides dans nos jardins, cet objectif de réduction s’applique en zones agricoles (ZA), mais aussi en zones non agricoles (ZNA), elles-mêmes divisées en ZNA professionnelles (espaces verts par exemple) et en ZNA amateurs. Environ 4,8 % des tonnages de substances actives sont utilisés dans ces ZNA, dont la majeure partie (60 %) par les jardiniers amateurs (UPJ, 2012). Quelque 6000 tonnes de pesticides[2] seraient ainsi utilisées au plus près de la population.
Les pesticides dans nos jardins
En tant qu’amateurs de plantes potagères, fruitières ou d’ornement, cette partie du plan Ecophyto 2018 nous concerne tout particulièrement. L’étude Jardivert (SYNAPSE, 2010) montre en effet que pratiquement tous les jardiniers amateurs ont utilisé ou utilisent des pesticides sans avoir conscience de la dangerosité de ces produits pour eux ou la nature : seulement 32% estiment que ces produits sont dangereux ; 20 % considèrent même que ces produits ne présentent aucun danger.
L’usage des pesticides est pourtant loin d’être anodin. Le non-respect des dosages, les usages inadaptés ou encore l’absence de précautions lors de l’application en font des produits potentiellement dangereux pour l’homme et son environnement.
Une mission en accord avec les valeurs de la SNHF
Informer, sensibiliser et aider les 17 millions de jardiniers amateurs français à modifier leurs pratiques est donc un enjeu de santé publique, environnemental et de société. Dans le cadre de conventions avec l’Office National de l’Eau et des Milieux aquatiques (ONEMA), la Société Nationale d’Horticulture de France (SNHF) participe depuis 2010 à l’axe 7 du plan Ecophyto 2018 et plus particulièrement à l’action 91, volet de création et d’animation d’une plateforme d’information et d’échanges de bonnes pratiques entre jardiniers.
Jardiner Autrement, un site d’informations fiables
www.jardiner-autrement.fr a ouvert en janvier 2011. Jardiner Autrement se veut un site d’informations fiables et sans parti pris autre que celui d’un jardinage raisonné. En rappelant les fondamentaux pour un jardin en bonne santé, en faisant le point sur les techniques alternatives efficaces, l’objectif est d’apporter des clés pour réussir un jardin plus respectueux de la nature. Jardiner Autrement, c’est raisonner : observer, comprendre, prévenir plutôt que guérir et choisir comment guérir en toute connaissance de cause. Les méthodes alternatives y figurent en bonne place, qu’elles soient indirectes (choix de la bonne plante au bon endroit, pratiques et aménagements favorisant la biodiversité, rotation des cultures…), physiques (désherbage manuel, voiles anti-insectes, bandes collantes…) ou encore de bio-contrôle (substances d’origine naturelle, auxiliaires…), thème qui fera l’objet de nouveaux contenus au cours des prochains mois.
Site de référence, www.jardiner-autrement. fr propose plus de 200 pages sur les bonnes pratiques au jardin. Il est régulièrement enrichi de nouvelles pages, de reportages, de fiches techniques (particulièrement appréciées des visiteurs) et de dossiers thématiques. Les jardiniers l’ont bien compris : le site a dépassé en mars dernier les 100 000 visites. Depuis novembre, 5 000 internautes par mois consultent le site Jardiner Autrement : 25 % d’entre eux sont des visiteurs fi dèles et le temps moyen passé sur le site atteint 3 minutes et demie.
« L'équipe Jardiner Autrement fait le pari de l'intelligence des jardiniers amateurs, de leur soif de connaissance et de leur capacité à raisonner leur jardinage. À l'opposé d'un recueil de recettes, notre démarche vise en effet à fournir dans un langage simple des outils méthodologiques et des connaissances scientifiques sur les végétaux, les ravageurs et maladies, les techniques culturales et les équilibres naturels au jardin. Toutes les personnes intéressées par le jardinage peuvent s'approprier ces outils et trouver dans les fiches du site les éléments indispensables pour établir un bon diagnostic et faire des choix éclairés », affirme Gilles Carcassès, chef de projet bénévole à la SNHF. « Réduire l'emploi des pesticides au jardin passe forcément par cette élévation du savoir. Car, si la prise de conscience de la responsabilité environnementale des jardiniers amateurs et leur conviction sont nécessaires pour atteindre ce but, les compétences que nous nous efforçons de leur offrir leur permettent de comprendre pour agir avec discernement au mieux de leurs intérêts et d'échapper, s'ils le désirent, aux pièges de l'obscurantisme comme aux sirènes souvent trompeuses de la consommation ».
Vous aimez partager votre expérience et vous enrichir de celle des autres ? Le forum Jardiner Autrement est tout indiqué ! Participez à l’émergence d’une communauté de web-jardiniers responsables www.jardiner-autrement.fr/forum
[1] Le plan Ecophyto 2018 est piloté par le Ministère chargé de l’Agriculture au niveau national, et par le Ministère de l’Écologie pour le volet zones non agricoles.
[1] Il faut bien ici faire la différence entre les substances actives et les produits formulés (les « pesticides »). Les substances actives entrent dans la composition des pesticides. D’après le taux de conversion indiqué par l’UPJ,1800 tonnes de substances actives en ZNA amateur et 1200 tonnes en ZNA pro, donnent respectivement 3600 tonnes de pesticides utilisés en ZNA amateur et 2400 tonnes en ZNA pro.
Échangeons nos bonnes pratiques
C’est la rubrique la plus visitée par les internautes. On y retrouve notamment les reportages réalisés dans les jardins lauréats du concours Jardiner Autrement, qui récompense les bonnes pratiques (choix des plantes, préservation de la biodiversité...) mais aussi l’ouverture et la pédagogie des jardiniers. Dans cette même rubrique, un accès privilégié au réseau d’experts impliqués dans le service Réponses aux Questions de la SNHF, a permis de répondre à plus d’une centaine de questions de jardiniers. Toutes sont capitalisées et les visiteurs peuvent ainsi s’informer sur l’accueil des bourdons dans un hôtel à insectes, l’utilisation de savon noir contre les pucerons ou encore la variété de poire Angélys tolérante au feu bactérien.
Les conférences
Déjà en 2011, la SNHF invitait les participants au colloque scientifi que « Jardiner autrement : stratégies environnementales au jardin » à repenser leur conception du jardinage et leurs pratiques. Ce colloque a été vulgarisé lors de 3 journées à thème début février 2012. Dans le cadre de Jardiner Autrement, 15 conférences et échanges autour du jardinage raisonné sont organisées cette année : rendez-vous le 10 mai à Bordeaux, le 20 mai à Courson, le23 mai à Pont - à- Mousson, le 22 juin à Marseille et le 28 septembre au Mans.
Plus de 1000 participants ont déjà assisté aux premières conférences, autant d’ambassadeurs pour un jardinage respectueux de l’environnement ! Pour en savoir plus, inscrivez-vous à la newsletter mensuelle Jardiner Autrement ou consultez l’Agenda en ligne. Vous aussi, rejoignez la communauté des jardiniers sur www.jardiner-autrement.fr !
REACH, acronyme de « Registration, Evaluation and Authorization of Chemicals » est le système intégré européen sur l'enregistrement, l'évaluation l'autorisation et les restrictions des substances chimiques. Entré en vigueur en 2007, il a remplacé plus de 40 directives et règlements et s'applique à tous les produits chimiques*. Il est complété par un règlement sur l'étiquetage et l'emballage de ces produits.
Les objectifs de REACH sont d'assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine et de l'environnement, de promouvoir les méthodes d'essai alternatives, et de renforcer l'innovation. La procédure d'autorisation mise en place incite au remplacement des substances les plus préoccupantes par d'autres moins dangereuses et au développement de technologies alternatives.
par Gilles Carcassès
* On estime à 119 millions le nombre de substances chimiques différentes connues actuellement dans le monde (source : Chemical Abstracts Service).
Sur la période 2008-2010, un recul très net des ventes de substances problématiques pour l’environnement (- 46 %) ou la santé humaine (- 87 %) a été constaté [3]. Ce déclin est notamment dû au retrait de 39 substances actives considérées comme les plus préoccupantes. Pour autant, l’indicateur de référence national, le nombre de doses unités (NODU) accuse une hausse globale (hors traitements de semences) de 2,6 %. Des efforts restent donc à faire !
Le recours aux produits de bio-contrôle augmente cependant de plus de 65 % sur 2008-2010 : un signal positif pour le basculement des pratiques vers des méthodes alternatives. Bien que l’évolution du NODU en ZNA amateurs ne soit pas encore disponible, d’après l’UPJ, cette tendance est particulièrement marquée pour les produits destinés au jardin.
Nombre de sociétés développent ainsi des gammes de bio-contrôle, en réponse à une volonté des consommateurs d’avoir un choix plus cohérent avec les exigences sociétales et sous l’impulsion du rapport du député Antoine Herth. Organismes vivants naturels (larves de chrysopes…), substances d’origine naturelle (huile de colza…) ou encore copies conformes du naturel (piège à phéromones…) sont d’ores et déjà accessibles aux jardiniers.
[3] Note de suivi, MAAPRAT, 2011. Calculs sur la base du Nombre de doses unités (NODU) indicateur de suivi Ecophyto.
article très intéressant, l’utile est la cause du bien-être, la cause du bien.