Art floral : Du conventionnel au contemporain
L’art floral a beaucoup évolué en soixante-quinze ans. Évoluer ne signifie toutefois pas changer totalement. L’art floral dit « classique » continue à se maintenir, mais d’autres styles contemporains sont apparus, notamment influencés par l’Ikebana et ses différentes écoles, mais aussi par une évolution de plusieurs courants de société, comme le retour à la nature. Deux acteurs majeurs, Marie Hélène Leduc et Bruno Lamberti, témoignent de cette évolution.
Depuis l’origine, avec des compositions dites « classiques », l’art floral connaît une constante évolution. Les amateurs ont fait exploser la créativité, les compositions se sont épurées, avec une mise en valeur de la ligne végétale.
« Aujourd’hui, on est davantage dans la créativité, dans la recherche du naturel, avec des fleurs que l’on peut cueillir dans son jardin ou dans la nature », indique Marie-Hélène Leduc, qui ajoute que « l’art floral occidental a été influencé par l’art de l’Ikebana et a pris son envol grâce à Monique Gautier dans les années 1975-1980. »
Une telle évolution dans l’art floral a motivé la création, en 1965, de la section « Art floral » au sein de la SNHF par Marie-Hélène Leduc, avec l’aide d’autres personnalités, comme la célèbre fleuriste rémoise Madeleine Morin, qui en a assuré la première présidence.
La technique du grillage
C’est son long parcours dans l’art floral qui a permis à Marie-Hélène Leduc de nous retracer son évolution. C’est le cas également de Bruno Lamberti, aujourd’hui président de la section Art floral de la SNHF, qui est entré un peu plus tard dans ce monde. Dans les années 1960, Marie-Hélène Leduc débute très jeune dans l’art floral. Elle suit quelques cours de base qu’elle estime très primaires. Elle souhaite, dès lors, mettre en pratique ses connaissances en trouvant un stage chez un fleuriste de renom de la Madeleine, ce qui lui a permis de participer à la décoration de lieux prestigieux.
À l’époque, l’usage et la technique de l’art floral étaient très différents d’aujourd’hui. « La mode était à l’ornementation de base des services de table, avec de jolis chandeliers fleuris. Les bouquets étaient confectionnés avec des supports de grillage où les fleurs étaient piquées. La mousse synthétique, inventée en 1954, n’était pas encore utilisée en France. Le style des grands bouquets était pyramidal, très classique », ce que confirme Bruno Lamberti, évoquant lui aussi les cônes étanches, en zinc, montés sur des tuteurs en bambou où les fleurs étaient insérées, afin de réaliser des compositions plus hautes. « On utilisait beaucoup les feuillages, comme cela se pratiquait en Angleterre, pour donner du volume aux bouquets. »
Des événements marquants
De grandes manifestations de prestige permettent à l’art floral français de s’exprimer dans toute sa splendeur. Marie-Hélène Leduc cite le Festival d’art floral de Versailles, dont elle était juge international, et sa contribution au succès des deux concours d’art floral aux Serres d’Auteuil (Paris) en 1985 et 1987, sans oublier les « Dix Noëls enchantés » de 1978 à 2003, ainsi que l’exposition « Tempête de Neige en 2009 », événement qui est encore dans toutes les mémoires… Il est impossible de citer toutes les manifestations organisées par la SNHF et sa section Art floral. Elles ont contribué et contribuent à mieux faire connaître et évoluer cet art sous toutes ses formes.
Le monde à Paris
« La SNHF accueille le monde entier », titre Jardins de France en septembre 1990. C’est à l’occasion de la WAFA (Word Association of Flower Arrangers, cf. encadré), présidée alors par Marie-Hélène Leduc, qu’une exposition qualifiée de « feu d’artifice de bouquets », organisée à Bagatelle du 13 au 17 juin, remporte un vif succès auprès de nombreuses personnalités ainsi que d’un large public. La section Art floral de la SNHF regroupe différentes écoles d’Ikebana, dont le talent a été maintes fois démontré à l’occasion de nombreuses expositions. Soulignons aussi la notoriété de ses adhérents, présents dans de multiples occasions. En février 2020, la section Art floral participe au treizième show mondial WAFA à Jaipur, où Bruno Lamberti obtient le premier prix pour sa composition florale, ô combien différente de celle qui lui avait valu, en 2014, deux récompenses dont « le Best » au concours international de Monaco pour sa composition « Roses de jardin dans un vase Médicis ».
La création du Dafa
Enfin, un élément moteur dans l’évolution de l’Art floral est la création, par la SNHF en 1976, du Diplôme d’animation florale artistique (Dafa). Il s’agit d’un examen organisé par la section Art floral afin de sélectionner toute personne apte à enseigner l’art du bouquet et à réaliser des animations. « La structure des compositions est très codifiée, avec différents critères comme les proportions, l’équilibre », souligne Marie-Hélène Leduc, à l’origine de ce diplôme et qui a souvent fait partie du jury d’examen.
Un art du vivant
La SNHF a donc contribué à l’évolution de l’art floral. « Nous l’avons fait progresser grâce à nos activités », souligne Marie-Hélène Leduc. Autrefois, ces expositions étaient très élitistes. Elles se sont démocratisées. « On ne rejette pas le traditionnel. Il faut respecter la personnalité de chacun », précise-t-elle. Et Bruno Lamberti de conclure : « Si l’art floral doit être ouvert à toute tendance, il doit s’adapter au végétal, tout en le respectant, en apprenant à le faire vivre, même coupé. Il reste un élément vivant! »
Jean-François Coffin
Journaliste, membre du comité de rédaction de Jardins de France