À Versailles, la renaissance du «Bosquet du théâtre d’eau»
Jean-François Coffin
« Quand on entre dans ce bosquet, on a l’impression qu’il a toujours été là », exprime Catherine Pégard, la présidente du domaine du château de Versailles, lors de l’inauguration, le 11 mai dernier, du « Bosquet du théâtre d’eau ». « Du temps de Louis XIV, c’était l’un des plus beaux, des plus festifs », ajoute-t-elle.
Mais avant d’arriver à sa renaissance d’aujourd’hui, ce bosquet a connu bien des vicissitudes. Créé par André Le Nôtre entre 1671 et 1674, le théâtre d’eau fut détruit sous le règne de Louis XVI, laissant la place à des allées et des surfaces engazonnées. Les arbres se développent. Lors de la tempête de 1999 où 325 arbres ont été arrachés, cela a failli être le coup de grâce ! En fait, ce fut un mal pour un bien ! En 2003, un grand plan de revégétalisation est décidé pour le domaine de Versailles. Les arbres en lisière du bosquet sont replantés. Mais la partie centrale reste vide. Est alors lancé un concours auprès des paysagistes pour sa réhabilitation, l’objectif n’étant pas de reconstituer le bosquet tel qu’il était sous Louis XIV mais de créer un jardin contemporain tout en évoquant la conception d’origine.
S’intégrer au domaine
C’est le projet de Louis Benech qui a été retenu. « Ce bosquet est destiné à faire la fête, à être joyeux », explique le célèbres paysagiste, « mais le risque était, en se projetant, de faire du Disneyland. Je n’ai pas cherché à être provoquant ». A la différence du bosquet de l’époque qui était réservé à des privilégiés, il fallait concevoir un lieu accessible au grand public, avec les contraintes que cela impose comme le haut niveau de fréquentation et les dommages qu’il peut entraîner.
Louis Benech a, d’une part, planté des chênes verts pour créer des ombrages, tenant compte de la nature sableuse du sol. « Si aujourd’hui nous sommes en plein soleil, demain nous serons à l’ombre. Nous avons donc du choisir des végétaux adaptés à ces deux situations ». Outre les chênes, le paysagiste a aussi prévu des hêtres, phillyrea latifolia… « Mais ils ne devront pas dépasser les dix-sept mètres voulus par Le Nôtre, permettant ainsi au bosquet de rester complètement invisible depuis le Château et de s’intégrer au domaine. »
Les Belles danses d’Othoniel
Pour le visiteur, la promenade commence à l’abri des chênes pour arriver à une « grande clairière de lumière et d’eau où les bassins apparaissent comme une scène de théâtre ».
C’est à l’artiste Jean-Michel Othoniel qu’a été confiée la réalisation des fontaines. Il s’agit de sculptures monumentales en verre de Murano, posées à fleur d’eau, évoquant des mouvements de danse pour rappeler les ballets qui se déroulaient dans le parc du temps de Louis XIV.
Le Bosquet du théâtre d’eau est maintenant accessible au public, après deux années de travaux. Si les végétaux ne sont pas encore à leur taille adulte, on perçoit déjà l’effet que produiront leurs ombrages. Louis Benech a prévu des subterfuges, comme la plantation de prêles pour cacher les bordures des bassins en métal encore bien visibles. Il a aussi pensé au visiteur en créant un banc spécifique au bosquet du théâtre d’eau : « Versailles XXI° ». Vous pourrez ainsi vous reposer lors de votre visite avant de la reprendre, voire esquisser un pas de danse comme cela se pratiquait dans ce bosquet du temps de Louis XIV !
Pour fêter la renaissance du Bosquet du théâtre d’eau, un ballet inédit a été créé par Benjamin Millepied, directeur du ballet de l’Opéra de Paris, avec la compagnie du L.A. Dance Project et une chorégraphie de Julia Eichten. Cette dernière s’est inspirée des fontaines créées par Jean-Michel Othoniel, lui-même ayant voulu évoquer les danses sous Louis XIV, telles « Le Rigaudon de la Paix et la Bourrée d’Achille ».