Terreaux, des normes pour bien choisir

Denis Jardel

« J’ai compris que mon jardin n’allait pas se faire en une saison. D’ici là, pour gagner du temps, j’ai décidé de le décorer avec quelques jardinières pour apporter un peu de couleurs et de verdure : la bonne terre de mon jardin sera parfaite pour remplir ces contenants, m’évitant ainsi des dépenses supplémentaires ! » Et bien non !

Pour obtenir de beaux végétaux, le choix du substrat est primordial - © D.R.
Pour obtenir de beaux végétaux, le choix du substrat est primordial – © D.R.
Une plante en bac : un être vivant qui reçoit et échange. La nature du terreau où elle est plantée doit en tenir compte - © D.R.
Une plante en bac : un être vivant qui reçoit et échange. La nature du terreau où elle est plantée doit en tenir compte – © D.R.

La meilleure des terres de jardins donnera de piètres résultats si on l’utilise dans une jardinière. Tout simplement parce que, dans un contenant, l’appareil racinaire de votre plante évoluera dans un milieu confiné, sans pouvoir tampon thermique et hydrique, où la circulation de l’air ne sera pas optimale et où les éléments nutritifs indispensables à la croissance doivent être présents. Les terreaux, ou supports de cultures, sont étudiés pour répondre à ces contraintes.

Homologation et normes strictes

Exemple d’étiquette où sont obligatoirement indiqués les constituants du terreau

Pour être commercialisés en France, les terreaux et fertilisants doivent être homologués[1], ou bien, et c’est la grande majorité des produits, répondre à des normes homologuées et rendues d’application obligatoires[2]. La norme qui règlemente la commercialisation des terreaux est la norme NF U 44-551 dont voici les principales exigences :

  •  Les boues d’épuration et les produits qui en sont issus ne peuvent pas être utilisés dans la fabrication des supports de culture.
  • Un terreau doit être composé majoritairement de matières organiques végétales, pouvant intégrer des amendements organiques, des engrais, des matières minérales, de la terre, des matières synthétiques et autres additifs agronomiques homologués pour cet usage.
  •  Le taux de matière organique (MO) doit être supérieur à 40 % de la matière sèche (MS).
  •  L’étiquette du sac doit mentionner différentes teneurs (Figure).
  • Lorsque qu’un terreau contient un engrais, c’est le cas dans la plupart des produits proposés dans le commerce, la teneur en azote, phosphore et potassium doit être inférieure respectivement à 2,5 ; 2 ; 2,5 exprimée en N, P2O5, K2O (% MS), et sous réserve que la somme des éléments totaux (N+P2O5+K2O) soit inférieure à 5 % de la MS.
  • Au minimum tous les six mois, des analyses doivent prouver son innocuité dans les conditions d’emploi. Les analyses des teneurs en éléments traces métalliques doivent être faites pour vérifier que les valeurs soient inférieures aux seuils définis par la norme. L’innocuité vis-à-vis des microorganismes et agents pathogènes doit aussi être analysée.

Des garanties sur les emballages

Les indications de conformités à des cahiers des charges apportent des garanties supplémentaires sur la qualité du produit, elles vous permettront de guider votre choix :

Sans titre 1

Choisissez le terreau qui correspondra le mieux à vos attentes

Un bon terreau doit assurer un compromis entre stockage d’eau et restitution à la plante, tout en évitant les risques d’asphyxie. Il contient un engrais qui permettra la croissance de la plante pendant plusieurs semaines. Conformément à la norme, il ne contient ni pathogènes ni substances toxiques. Ses propriétés physiques et les matières organiques qui le composent doivent être stables. Enfin, il doit garder sa souplesse et reprendre son volume initial lorsqu’on le sert dans sa main.

Avant de faire votre choix, il est primordial de bien définir votre besoin :

  •  Pour remplir un bac ou une jardinière et y planter divers végétaux, optez pour un terreau « horticole » ou « plantes fleuries ».
  •  Pour les cactées, les bonzaïs, ou les orchidées, choisissez des terreaux spécifiquement formulés pour convenir aux besoins de ces végétaux.
  •  Pour produire vos plants de légumes et de fleurs, vous utiliserez un terreau « semis ».
  •  Pour améliorer les qualités physiques, biologiques et nutritives de votre terre de jardin, choisissez un amendement organique (fumier de cheval composté, compost ou tout autre fertilisant organique).
  •  Pour corriger l’acidité de votre terre, il vous faut un amendement basique : dolomie, carbonate de calcium, lithothamne, chaux. Attention, la chaux n’est pas autorisée en agriculture biologique.
  •  En cas d’absence de sol propre à la culture, il convient d’apporter un substrat tel qu’un terreau « plantation » ou « potager, maraicher » ou encore « terre végétale ».

La deuxième étape consiste à choisir le « bon » terreau parmi l’offre très large proposée en magasin. Pour cela il faut lire et comprendre les informations techniques qui figurent au dos des sacs. Voici un exemple d’étiquette sur lequel nous avons apporté quelques commentaires :

L’appareil racinaire de cette pensée s’est développé sur toute la périphérie du godet dans lequel elle a été élevée. Sa couleur blanche indique un bon état sanitaire. Pour une garantie lors de sa transplantation, le choix du terreau sera primordiale - © D.R.
L’appareil racinaire de cette pensée s’est développé sur toute la périphérie du godet dans lequel elle a été élevée. Sa couleur blanche indique un bon état sanitaire. Pour une garantie lors de sa transplantation, le choix du terreau sera primordiale – © D.R.

Des matières premières savamment dosées

Un terreau est constitué de différentes matières premières savamment dosées, chacune ayant des caractéristiques différentes et complémentaires.

Tourbe blonde : elle provient de la décomposition incomplète de végétaux (principalement de sphaignes) dans un milieu saturé en eau, elle a une capacité de rétention en eau très élevée, couplée à une bonne aération, sa densité est faible. Par contre, lorsqu’elle se dessèche, il est très difficile de la ré-humidifier, son acidité doit être neutralisée pour obtenir un terreau convenant à la majorité des végétaux.

Tourbe brune et noire : elle résulte également de la dégradation de végétaux en milieu saturé en eau mais elle est plus ancienne et donc plus évoluée que la tourbe blonde. Elle a une capacité de rétention en eau et de stockage des éléments nutritifs plus importante, mais elle est plus dense. Il est aussi difficile de la ré-humidifier.

Écorces : elles proviennent de l’exploitation forestière, elles doivent être broyées et compostées pour dégrader les substances phytotoxiques qu’elles contiennent et diminuer le rapport carbone/azote pour éviter le phénomène de faim d’azote[3]. Elles jouent un rôle d’aération et de drainage dans le terreau

Fibre de coco ou « coco peat » : elle constitue l’enveloppe fibreuse de la noix de coco, ses caractéristiques sont proches de celles de la tourbe blonde, mais elle est plus dense, son pH est moins acide et, surtout, elle se ré-humidifie très facilement.

D’autres matières premières minérales sont couramment utilisées pour donner du poids au terreau, améliorer l’aération et le drainage. Ce sont les sables, la pouzzolane (roche volcanique), l’argile, la perlite (sable siliceux chauffé à 1100 °C et expansé), et la vermiculite (argile chauffée à 1100°C et expansée).

Les définitions officielles

Les jardiniers amateurs font souvent la confusion entre terreaux et fertilisants, alors que ces produits sont totalement différents.

Voici les définitions officielles qui figurent en préambule dans la norme française qui règlemente les terreaux et les matières fertilisantes.

Supports de culture

« Produits destinés à servir de milieu de culture à certains végétaux. Leur mise en œuvre aboutit à la formation de milieux possédant une porosité en air et en eau telle qu’ils sont capables à la fois d’ancrer les organes absorbants des plantes et de leur permettre d’être en contact avec les solutions nécessaires à leur croissance »

Matières fertilisantes

« Les matières fertilisantes comprennent les engrais, les amendements et, d’une manière générale, tous les produits dont l’emploi est destiné à assurer ou à améliorer la nutrition des végétaux ainsi que les propriétés physiques, chimiques et biologiques des sols »

Amendements organiques

« Matières fertilisantes composées principalement de combinaisons carbonées d’origine végétale ou animale et végétale en mélange, destinées à l’entretien ou à la reconstitution du stock de matière organique du sol et à l’amélioration de ses propriétés physiques et/ou chimiques et/ou biologiques »

Amendements minéraux basiques

« Matières fertilisantes contenant des carbonates, des oxydes, des hydroxydes et/ou des silicates, généralement associés à du calcium et/ou du magnésium, et destinées principalement à maintenir ou à élever le pH du sol et à en améliorer les propriétés »

Engrais

« Matières fertilisantes dont la fonction principale est d’apporter aux plantes des éléments directement utiles à leur nutrition (éléments fertilisants majeurs, secondaires et oligo-éléments) »

Substrats et toitures

Tests de végétalisation de toitures à Lausanne - © J.-F. Coffin
Tests de végétalisation de toitures à Lausanne – © J.-F. Coffin

Les substrats pour toitures végétalisées extensives, doivent répondre à des fonctions et contraintes techniques très poussées : assurer le support d’une végétation et son alimentation hydrique et minérale dans des conditions extrêmes, d’extensivité et de sécheresse en induisant le minimum de charge possible au bâtiment (densité et épaisseur faibles – 3 à 12 cm d’épaisseur) ; être suffisamment perméable pour qu’une forte pluie soit rapidement évacuée sous peine d’entraîner une surcharge dommageable pour la toiture.

La végétalisation des toitures terrasses extensives n’est pas encadrée réglementairement mais bénéficie de règles professionnelles reconnues renseignant notamment sur les propriétés de substrats à respecter. Il est intéressant de croiser les informations avec les règles FLL allemandes et la norme suisse SIA 312.

Ces substrats possèdent une granulométrie grossière (supérieurs à 2 mm), en lien avec la recherche  et représentent de 70 à 95 % du substrat. Dans la fraction fine (inférieure à 2 mm), la classe des sables est majoritaire (moins de 3 % sur substrat total en limons et argiles). La fraction en matière organique est importante elle assure une rétention d’eau conséquente (30 à 45 % en volume en moyenne), à relativiser toutefois avec l’étude des courbes de rétention en eau montrant un assèchement assez rapide. Il  est recommandé d’exiger ces courbes de rétention en eau lors de tout projet pour comparer les performances hydriques entre fournisseurs.

Pour en savoir plus, une étude est disponible sur le site internet de Plante & Cité : www.plante-et-cite.fr

Olivier Damas

[1] Consultation possible de la liste des produits homologués sur le site : ephy.anses.fr en allant dans la catégorie MFSC : support de culture et matières fertilisantes.

[2] Ces normes sont consultables sur le site de l’AFNOR, association française de normalisation : www.afnor.org

[3] Faim d’azote : lorsqu’on apporte au sol, ou dans un substrat, de la matière organique riche en carbone et pauvre en azote (C/N supérieur à 25), les microorganismes mobilisent à leur profit l’azote présent dans leur environnement : au détriment des végétaux qui s’y trouvent.

 

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