Le capitulaire De Villis de Charlemagne : Une exposition d’illustrations botaniques à Bernay
Représenter les plantes du capitulaire De Villis: tel est le pari d’Élisabeth Vitou et Ariane Mercier. Ces spécialistes de l’illustration botanique organisent une exposition cet été au musée de Bernay (Eure). Plus de cent-vingt aquarelles seront présentées. L’occasion de découvrir les préconisations de Charlemagne en matière de plantes pour les jardins de ses domaines.
Bien avant Sully, Charlemagne a voulu réformer l’agriculture et l’administration de ses immenses domaines en établissant un certain nombre de recommandations inscrites dans un capitulaire, document comportant plusieurs « capitules », c’est-à-dire articles. « Le capitulaire de Villis est le premier texte “officiel” sur ce que doit être un jardin. Il servira de référence tout au long de l’époque médiévale », précise Élisabeth Vitou, présidente de la section Beaux arts de la SNHF. Le capitulaire De Villis comprend, dans les capitules 43, 62 et, surtout, 70, une liste d’une centaine de plantes qui se répartissent en trois grandes catégories : plantes comestibles, médicinales, tinctoriales, assurant de fait une autonomie complète. À cela, s’ajoutent seize arbres, essentiellement des fruitiers. Peu de fleurs, hormis celles du jardin de Marie : lys, rose, glaïeul. Une seule plante « magique » : la joubarbe. Parmi les plantes comestibles, on retrouve les trois principales ressources alimentaires de l’époque : les « herbes », qui servaient à cuisiner le « pot-herbes », les pois et les racines.
Un terreau pour l’illustration botanique
« Cette simple liste en latin d’une centaine de plantes présente, pour l’illustration botanique d’aujourd’hui, de nombreux atouts qui forment un programme de choix », indique Élisabeth Vitou. Elle précise : « Aux “flous” historiques qui l’entourent (Charlemagne ou Louis le Pieux ? date ? auteur ? aléas de la traduction latine…) s’ajoute celui de l’évolution horticole depuis sa diffusion, qui font que de nombreuses plantes ont bien changé depuis, tout comme leur utilisation. »
Une exposition et un jardin
Ariane Mercier et Élisabeth Vitou se sont emparées de ce sujet pour monter, cet été, une exposition sur l’illustration de ces plantes au musée de Bernay (Eure). « Le parti pris artistique retenu pour ce projet, représenter les plantes du capitulaire, tient compte de plusieurs facteurs : grande liberté d’interprétation des motifs (le capitulaire n’est pas illustré à l’origine), références lointaines à l’époque médiévale (triptyques, guirlandes, faux textes, mise en page…), respect des expressions artistiques personnelles des artistes et choix des motifs représentés laissé au libre arbitre de chacun. »
Une vingtaine d’artistes exposeront leurs illustrations, soit plus de cent-vingt œuvres avec, comme fil directeur, la liste des plantes et une technique commune : l’aquarelle. Pour l’occasion, un enclos sera réaménagé dans le petit jardin des simples sur le terrain qui entoure le musée, lui-même installé dans une ancienne abbatiale.
Propos recueillis par Jean-François Coffin