Sakurako Florentin-Nagira : L’ambassadrice franco-japonaise

Elle est née et vit sous le signe de la fleur. Son prénom, Sakurako, signifie en japonais « petite fleur de cerisier ». Son nom de jeune fille, Nagira, signifie « appréciée du saule ». Et elle ajoute que son nom de famille, Florentin, évoque les fleurs ou la floraison pour les Japonais. Tout un symbole pour cette dame dont l’activité est intense, entre le monde horticole et son rôle d’ambassadrice entre la France et le Japon.

 

Sakurako Florentin-Nagira
Sakurako Florentin Nagira lors du baptême de sa rose ‘Sakurako Nagira’ le 17 juin 2022 à la roseraie du Val-de Marne de L’Haÿ-les Roses © Sakurako Nagira

 

Sakurako Florentin-Nagira, petite seulement par la taille, impressionne. Toujours bien mise, d’apparence réservée, délicate comme le sont souvent les Japonais.

On ne soupçonne pas ses multiples et intenses activités. Déjà impliquée dans les relations commerciales et internationales pour son pays, elle arrive en France à 31 ans pour travailler chez L’Oréal.

Employée depuis neuf ans chez un distributeur de cette société au Japon, elle a eu alors la chance de se voir proposer un poste en France.

Bagatelle au Japon

Parmi les multiples activités de ses relations franco-japonaises, celles au sein du monde horticole occupent une place de choix, à commencer par son implication dans la célèbre roseraie parisienne de Bagatelle, au cœur du bois de Boulogne. En 1997, la ville de Paris a entamé un projet international de création d’une roseraie Bagatelle au Japon, à Kawazu, à 250 kilomètres de Tokyo.

 

 

Cette réalisation est le fruit d’une convention signée entre les deux villes, alors que Janic Gourlet, actuel président de la section Roses de la SNHF, était directeur des Parcs, jardins et espaces verts de la capitale. La ville de Kawazu a demandé à Sakurako d’être leur intermédiaire, en raison de ses qualités de diplomate, de ses bonnes
connaissances des mentalités française et japonaise, de ses relations à haut niveau dans les deux pays. Après l’inauguration de la roseraie japonaise en 2001 – « Kawazu Bagateru Kôën » en japonais, ou « Jardin de Bagatelle de Kawazu » – elle gardera le lien entre les deux villes.

Souvent citée comme « copie conforme » ou « jumelle » de Bagatelle, cette roseraie regroupe 6 000 rosiers de 1 100 variétés sur sept hectares. « Les jardiniers de Kawazu viennent souvent en France pour connaître différentes techniques et les appliquer au Japon », nous dit Sakurako, qui assure à chaque fois son rôle d’interprète et d’intermédiaire. Et depuis 1997, elle participe au jury du Concours international des roses nouvelles de Bagatelle, puis entre au jury de sa commission permanente. Elle contribue aussi à l’élargissement de la roseraie grâce aux échanges de rosiers avec le Japon.

En 2021, un obtenteur japonais gagne pour la première fois un prix à Bagatelle : Takunori Kimura, soutenu par les Roses André Ève, leur éditeur en France. Et, comme souvent, c’est Sakurako qui s’est impliquée dans cette action. En échange, la société Kimura commercialise les rosiers des Roses André Ève au Japon.

Personnalités inauguration rose
Sakurako s’exprime devant les personnalités lors de l’inauguration de la rose ‘Sakurako Nagira’ © J.F.-Coffin

Roses et pivoines arbustives japonaises

Autre activité marquante, sa participation, de 2007 à 2017, à l’International Roses & Gardening Show, qui se déroule chaque année depuis 1999. Cet événement/exposition autour des roses et des jardins était organisé par la télévision nationale japonaise NHK dans l’immense Seibu Dome Base-ball Stadium, près de Tokyo. Sakurako a non seulement participé à l’organisation mais également au show sur la scène. En parallèle, elle présentait des rosiéristes, des marques françaises et des jardins français. « Pendant cinq jours, la fréquentation quotidienne était de 50 000 visiteurs », savoure-t-elle.

Cette expérience d’intermédiaire entre la France et le Japon a entraîné d’autres activités pour Sakurako, comme l’importation d’une centaine de pieds de pivoines arbustives de variétés japonaises au Parc floral de Paris en 2003, ainsi qu’au Jardin des Plantes en 2004. En 2017, ce sont 70 pieds de pivoines arbustives japonaises qui sont offerts au Jardin des plantes d’Orléans (Loiret) grâce à son intervention, et en 2018, la même opération est répétée pour le jardin de Claude Monet à Giverny (Eure), à l’occasion de l’exposition « Japonismes ». Ces pivoines sont également commercialisées par les Roses André Ève. Sakurako contribue ainsi aux échanges de variétés françaises et japonaises, que ce soit pour les roses ou les pivoines.

Japonisme

Sa venue en France en 1991 l’a conduite à apprendre le français en autodidacte et Sakurako s’excuse des fautes qu’elle peut commettre ! Elle évoque, notamment, les difficultés de prononciation du « R », qui n’existe pas en japonais et se prononce « L » (son prénom se prononce donc « Sakulako » dans son pays).

Entre temps, Sakurako crée, en 1997, sa propre entreprise, Florentin consulting, lui permettant d’avoir un support juridique pour ses activités d’interprète, mais avant tout d’intermédiaire entre les deux pays. Une fonction qui oblige à des horaires très souples, et souvent un travail de nuit quand on prend en compte les sept à huit heures de décalage horaire. Parmi les projets auxquels elle a contribué, l’événement « Japonismes 2018 : les âmes en résonance », marquait le 160e anniversaire des relations diplomatiques entre le Japon et la France, avec notamment l’installation, pendant six mois, sous la pyramide du Louvre, de l’œuvre Throne du sculpteur japonais Kohei Nawa. Fin 2021, cet artiste a remporté le concours lancé par le Département des Hauts-de-Seine pour la mise en place d’une statue de 25 mètres de haut à l’extrémité de l’Île Seguin nommée Ether (égalité), à côté de la Seine musicale. Sakurako reste l’intermédiaire entre l’artiste et la société de construction.

Rosiers dans un jardin japonais

Malgré ses actions dans l’international et le monde des arts, Sakurako ne renie pas sa passion horticole. En France, elle est membre du jury du Grand Prix de la rose de la SNHF et participe à de nombreuses activités dans ce domaine.

Exposition rosiers
L’exposition « Cent variétés de rosiers sélectionnés par Sakurako » dans le ardin japonais Yuushien © Sakurako Nagira
Expositions des rosiers
L’exposition « Cent variétés de rosiers sélectionnés par Sakurako » dans le ardin japonais Yuushien © Sakurako Nagira

Au Japon, elle a organisé en 2022 l’exposition « Cent variétés de rosiers sélectionnés par Sakurako », dans le jardin Yuushien. Elle y présente des variétés françaises, japonaises et d’autres pays, notamment des rosiers résistants aux maladies. « C’est la première fois que des rosiers sont présentés dans un jardin japonais. Le propriétaire, Yuushien, souhaite recommencer annuellement. Je le ferai cette année également », souligne-t-elle. D’autres projets sont en cours mais Sakurako n’ose pas trop les évoquer tant qu’ils ne sont pas concrétisés. C’est le cas d’une plantation de cerisiers japonais envisagée en Normandie.

Exposition Sakurako
L’exposition « Cent variétés de rosiers sélectionnés par Sakurako » dans le ardin japonais Yuushien © Sakurako Nagira

Une rose pleine de charme

Cerise sur le gâteau ou plutôt fleur sur le rosier:
Sakurako, qui œuvre pour le rayonnement à l’international de la roseraie du Val-de-Marne de L’Haÿ-les-Roses (Val-de-Marne), a baptisé sa rose ‘Sakurako Nagira’ le 17 juin 2022, au cœur de cette roseraie, en présence de nombreuses personnalités, dont la comtesse Jean de Foucaud, créatrice du Conservatoire de pivoines, et Azumi Takarada, représentant l’ambassadeur du Japon. Cette création de Jacques Ranchon, des pépinières Paul Croix, commercialisée par les Roses André Ève, porte « des petites roses en coupes très doubles, qui évoquent les cerisiers japonais en fleurs, et donc le prénom de Sakurako… Un rosier plein de charme ! » Vous avez dit charme ? Mais oui, Sakurako…

 

Jean-François Coffin
Journaliste et membre du Comité de rédaction de Jardins de France

www.roses-andre-eve.com
roseraie.valdemarne.fr
decouvrezmatsue.wordpress.com/le-jardin-japonais-yuushien

Si vous lisez le japonais :
bagatelle.co.jp
www.yuushien.com