Sylvaine et l’art floral : Une compétitrice paralympique
« Toute petite, j’aidais déjà ma mère à cultiver des fleurs, elle qui rêvait d’être fleuriste ! » Aujourd’hui, Sylvaine Agator, issue d’une famille d’horticulteurs, poursuit le même rêve que sa mère et rayonne de joie à son poste de formatrice au CNPH-Piverdière. Elle est candidate à la finale des Abilympics : le championnat du monde des métiers en 2022 à Moscou.
Née avec une malformation de la main gauche, Sylvaine Agator a puisé sa force et sa passion pour le métier de fleuriste au travers de ses expériences professionnelles et personnelles.
Après le lycée, elle s’oriente vers un baccalauréat scientifique, tout en gardant en tête « l’idée de travailler auprès de la nature et des fleurs ». Le bac en poche, elle poursuit vers un BTS technico-commercial « Jardin et Végétaux d’Ornement » à l’ESA (École supérieure d’agricultures) d’Angers. Elle doit réaliser un stage professionnel à l’étranger qu’elle effectue à Manchester, en Angleterre.
Elle y découvre l’art de l’élaboration d’un bouquet de fleurs. Sylvaine décide alors de concrétiser son rêve : devenir fleuriste.
Elle obtient son CAP et son brevet professionnel fleuriste grâce à la formation par apprentissage. « Cette formation est un réel atout et nous permet de concrétiser les techniques apprises lorsque nous retournons en boutique », précise-t-elle.
Sélectionnée pour les Abilympics
À 23 ans, Sylvaine concoure aux Abilympics France, Olympiades des métiers des personnes handicapées (cf. encadré). Après avoir franchi les étapes départementale, régionale puis nationale, Sylvaine est médaillée d’or dans la catégorie « Art Floral ». En mai 2022, la sélection française se rendra à Moscou pour les Xes Internationaux Abilympics. Sylvaine représentera les couleurs de la France dans la catégorie « Art floral » pour cette manifestation qui contribue à faire changer le regard sur le handicap.
Un entraînement franco-russe
Ce succès est le fruit d’une intense préparation, tant physique que mentale. Les week-ends, Sylvaine participe à des entraînements en équipe où elle côtoie d’autres métiers tels que des boulangers ou des mécaniciens qui participent également aux Abilympics dans leur catégorie. Comme pour les sportifs, cela permet d’apprendre à se connaître soi-même et à se surpasser. « Par exemple, j’ai appris à respirer pour mieux gérer mon stress lors des épreuves au concours. » Quant à la pratique, elle se fait métier par métier, avec un coach et des stages techniques. « J’ai eu la chance d’être accompagnée par des professionnels dont un fleuriste angevin, Quentin Choplain », souligne avec fierté Sylvaine. Elle poursuit ses entraînements physiques et techniques avec ardeur. Elle participera à des séminaires pour échanger avec les professionnels et être à l’affût des nouvelles tendances. Pour sa préparation professionnelle, elle va suivre un entraînement franco-russe. « Je connais très peu la culture, les goûts, les tendances de la Russie, pays d’accueil des Abilympics. C’est important pour moi de m’informer. Peut-être les sujets des épreuves auront-ils un lien… », explique-t-elle.
L’art et le bricolage
L’organisation de ces épreuves est assez incroyable. « Pour la création des structures, nous aurons à notre disposition un atelier digne d’un menuisier, comme une scie sauteuse (ma meilleure amie) et pleins d’autres outils… Il faut avoir des capacités tant en bricolage qu’en art floral. Mon handicap n’est pas un frein, je vis avec et je m’adapte ! », indique Sylvaine. Tous les participants bénéficient du même équipement. Ils ont le droit d’utiliser tout ce qui est mis à leur disposition et « même de découper la table ! » Les épreuves sont un vrai spectacle auquel le public a le droit d’assister. « Je conseille à ceux qui ne savent pas encore quelle profession exercer d’aller voir les épreuves préparatoires ou finales. Ils peuvent y découvrir un métier dont ils ignorent l’existence », explique Sylvaine. C’est également une belle occasion de percevoir les compétences qu’exigent ces métiers. « Pendant la compétition, le public ne voit pas le handicap mais le professionnalisme, les techniques et l’art du métier. »
Formatrice en art floral
« Le fait d’échanger avec d’autres personnes venant d’univers différents est très enrichissant sur le plan professionnel et m’a donné envie d’être formatrice. Je me devais de transmettre. » Après quelques années en boutique, Sylvaine postule au CNPH-Piverdière, spécialisé dans les formations en production horticole, fleuristerie et commerce (cf. encadré). Depuis un an et demi, elle a rejoint l’équipe au poste de formatrice en art floral et technologie professionnelle. Elle est également la « référente handicap » du centre de formation.
Le plaisir de partager
Avec du recul, Sylvaine a su tirer de nombreux avantages de la participation à ces concours. D’un point de vue personnel, cette compétition l’a aidée à gérer les imprévus du quotidien et les émotions. « Lors des épreuves, il peut y avoir des contretemps. Il faut trouver aussitôt une solution. Dévoiler mon handicap me le fait oublier, malgré les douleurs qu’il provoque. » Les Abilympics soutiennent la pleine participation des personnes handicapées à la société en mettant en exergue leur employabilité. Représenter la France est une réelle chance pour Sylvaine. Ce nouveau défi permettra à cette Angevine de « laisser la notion de handicap de côté au profit de la mise en avant des compétences professionnelles, le tout dans une ambiance chaleureuse et conviviale ». En attendant la finale à Moscou en 2022, Sylvaine se prépare ardemment tout en partageant avec bonheur son métier de formatrice !
Jean-François Coffin (journaliste), avec la collaboration de Frédéric Sérusier (chargé de projet CNPH-Piverdière)
Membres du Comité de rédaction de Jardins de France